On était tranquille, le mois d'août commençais à sentir la mer & v'là t'y pas que le papier se remet à faire du bruit autour de Flouze Brother. Faut dire que le ministre il est pas vraiment à l'aise avec toutes les boutiques où il a bossé. On l'a déjà aligné avec la famille L'Auréole & là c'est la même chose avec un artiste tôlier de la haute. Quasi même motif, même punition. La différence est que cette fois-ci c'est pas renvoyer du blé à celui à qui on en a trop piqué, c'est s'arranger pour que sa marmaille en paye pas trop dès le départ. C'est plus « j'te pique, j'te rends » c'est « j'te pique pas ». On couvre tous les cas de figure sauf « j'te pique, point barre », mais ça c'est pour Marcel Dupont & tout les autres.
Honnêtement, c'est vrai que pour le péquenaud moyen ça fout les boules de savoir que, si t'es un bourge de compétition & un vrai, un qu'encaisse le RMI de tout l'immeuble en quelques heures, alors les pantoufles de Bercy vont te filer de l'avoine au lieu de pomper sur ta récolte. C'est toujours comme ça avec la façon qu'on a de raconter les histoires. On gonfle tout pour faire rire, pleurer ou trembler ; kif-kif avec le téléphone arabe, tu files un tuyau à un pote & tu retrouves le contraire dans le canard du matin, parce que ça lui fait des jolis plumes.
Exemple : suite au décès d'un ferrailleur y a un paquet de tôles en héritage & ceux à qui on va les fourguer doivent en filer un bout. On fait un premier compte & on trouve 1 200 tonnes de tôles. Ça fait lourd, très lourd & les gamins doivent payer un paquet, une douloureuse de cent patates. Y'en a qui râlent parce qu'y en a un peu beaucoup trop & qu'ce serait sympa de recompter histoire que tout le monde soit d'accord avec le partage. Un juge est mis sur le coup & y suit le mouvement. On recompte & y'en a moins cette fois-ci, genre des restes de bagnoles qui avait cartonné grave & qui ne valent pas grand chose. Ça fait trois cents tonnes en moins. On a donc 27 patates de moins à filer à Riri & sa fiscal team.
Résumons pour le voisin d'en face qui comprend pas trop : Y'avait trois cents bouts de tôle en trop & au prix où qu'ça coûte ça fait 27 briques à oublier. Riri était d'accord avec les gars en robes noires & de toute façon il est pas de corvée sur ce genre de chose.
Les papiers comprime l'histoire en ne gardant que c'qui fait le plus du bruit : Riri fait cadeau de 27 bâtons à un groupe de pétés de tunes.
Voilà, z'avez compris. Y'a différentes façons de lâcher le morceau. Des fois on l'ouvre & on dit pas tout parce que les autres savent de quoi on cause, d'autres fois on raconte pas tout pour pas avoir de problèmes au cas où il y ait un képi dans la salle, ou, enfin, on dit pas tout pour garder des trucs pour plus tard. Maintenant, entre nous, si les marchands de boniments disaient ce qu'on sait déjà on irait pas raquer pour leur prose. C'est quand même bien quand y disent pas tout, histoire d'avoir des épisodes sous le coude. Mais c'est pas parce qu'on dit pas tout qu'on dit n'importe quoi, hein !