Y a quelques années maintenant, la fifille cherchait à coincer sa daronne pour pouvoir mettre la main sur le paquet avant qu'elle claque (la vieille d’abord de préférence). Avoir des tonnes de fromage sous le nez & pas pouvoir y toucher, ça vous donne faim, même après un bon gueuleton.
Faut avouer que la vioque avait filé un paquet de fraîche à Francis, un copain de feu son canard. Qu'est-ce que je dis un paquet, une brouette, un camion de talbins. Et puis pas que du papier, des toiles, des chandeliers, des soupières... un vrai déménagement pour refaire Chenonceau du sol au plafond.
Alors, vous avez beau être seule sur la liste d'attente, ça vous les hache de savoir que le pote des parents se charge les fouilles & vous, vous poireautez que la vieille elle canne. Pourquoi pas la refiler à l'hospice la greluche ? C'est vrai quoi, elle a plus le tambour qui raisonne, l'ancêtre. Elle fourgue une partie du pactole à un gus qu'est pas de la maison !
Francine va donc voir un bavard pour monter une histoire & coincer la vieille. Le seul truc qu'elle avait oublié la Francine, c'est que, la mémé, elle a toujours la perruque sur les endosses. On la lui fait pas comme ça. Et la gamine, elle, elle s'est vautrée comme une débutante. Ça a causé dans les chaumières & on a dit dans les papiers que plus t'as de pognon moins t'as de potes, mais ça on le savait : qui va dégraisser quelqu'un qu'a les fouilles vides ?
Vous, si vous étiez le porteur de robe, vous auriez dit quoi ? Hein ? Une chieuse vient vous réveiller parce qu'elle trouve que sa matrone sait plus à qui y faut faire des chèques. On demande à rencontrer la malade & là on reste le cul par terre. Elle a toute sa tête la vioque. C'est vrai que maintenant elle a les esgourdes un peu étanches, si tu veux qu'elle capte ta jactance vaux mieux que tu gueules leennteemmmeent. Mais bon, c'est pas parce que les autres savent pas vous causer que vous êtes nulle ! Lilly a donc un ciboulot qui tient encore le pavé & si c'était une conne de compétition, elle l'aurait toujours son tas de joncs ? À octante passées ? En plus elle a une équipe de première pour cornaquer le pécule.
Francine se plante au premier épisode que v'là t'y pas que Pousse Bouton lui rentre-dedans. Il est pas content qu'on raconte qu'il a cherché à arnaquer la vieille. Faut dire que quand tu la connais depuis toujours & qu'on dit que t'aurais profité qu'elle avait le trognon moisi pour te refaire, tu l'as mauvaise. Il attaque la fille qu'attaque sa mère & lui. Ça commence à faire des nœuds & faudra bientôt se la jouer Alexandre pour en sortir.
Clara elle est comme Bébé. Elle est dans la bande à Lilly depuis qu'elle a passé son brevet. Et comme Bébé elle quitte l'équipe juste avant que ça pète. Ch'erais Lilly je garderais toute la bande sous le coude, parce que là, à chaque fois qu'y en a un qui se casse, il ouvre sa gueule & lâche tout & n'importe quoi. Avec tout ce qu'y jettent sur le carreau on va finir par croire que celui qui tient la cuisine de la maison est un nul de compétition, un salisseur de vaisselle comme on en trouve plus. Sauf dans les tortorants amerloques, mais eux y goupinent vite pour faire du chiffre ; ce qui compte c'est pas ce qu'y a dans l'assiette, c'est ce qu'y a dans la caisse.
Bref, Clara prend ses cliques & ses claques avec une poignée de main pleine de biftons de la part de la daronne. Autant Bébé on sait ce qu'y veut faire avec ce qu'il a encaissé, autant Clara on a pas encore une idée. Elle est à mi-temps chez les pandores depuis qu'elle a ouvert son moulin. C'est dur d'aller planter sa tente ailleurs quand on a les condés dans les reins.
Histoire de niquer Bébé sur le nombre de fois où on cause d'elle sur le papier, Clara aboie à tue-tête. Son truc ce sont les grands-livres & elle s'est cassée avec son brouillon. Ce qui fait qu'elle aussi elle a plein de conneries sous le coude. Le truc c'est que ce qu'elle a c'est dans le désordre & ça donne dans le genre : mardi matin Madame Lilly me demande de passer à la pompe à flouze & ramener tout ce qu'elle peut porter, mercredi soir Madame rencontre Riri.
Conclusion du journaleux de base : la vieille a filé un paquet de tunes à Riri. Conclusion d'un perdreau de base, avant de voir le ministre, elle a fait ses provisions ; alors zéro partout balle au centre.
De façon plus sérieuse, pour le gratte-papier qu'est payé à la ligne : la daronne a tiré mes deux années de salaire, avec prime & reuteuteu, & le lendemain elle se prend un canon avec celui qu'a les clefs du coffre de la bande à Nico ; c'est clair, elle arrose. Pour le képi de service ça donne : elle prend du cash, beaucoup, mais pas plus que ce qu'elle empoche toutes les heures & elle a un rancart le lendemain : & alors ? En plus, c'est toutes les semaines qu'elle prend autant de monnaie, j'vois pas ce qu'y a de spécial. Sinon faudrait aligner tous ceux avec qui elle a eu un rencard le lendemain où elle a vidé la cracheuse de bifton du coin de la rue. Si on fait ça, on a tous les bonnets de la capitale qui vont y passer.
Là on a mis la loupe sur ce qui fait la différence entre un gars qu'est payé pour écrire & un autre pour lire. Le premier y cherche ce qui va plaire à la rue, le second ce qu'y va raconté à l'enjuponné. On est mal barré j'vous dis. Entre la prose de Bébé & les chansons de Clara on a le droit à des papelards qui racontent tout & n'importe quoi. Remarquez que c'est ça qu'est bien aujourd'hui, on fait dans la presse mieux qu'à l'écran. T'as un nouvel épisode tous les matins & y remettent les pendules à zéro à tous les coups. Lundi Riri est mal barré avec sa greluche qu'est à la solde de Lilly, mardi Riri s'enfonce avec le pognon que son équipe a rendu à la vieille, mercredi c'est Francine qu'attaque tout le monde, jeudi c'est Clara qui lâche que Riri y touchait aussi du flouze, vendredi c'est Bébé & Clara qui ont les fouilles qui débordent, samedi t'as Pousse Bouton qui se pointe pour gueuler après Francine & dimanche c'est calme, les crayons se taillent, les plumes s'affinent & on a le tiercé qui fait la une. Pour une fois, on cause de chevaux qui avancent & pas de juments qui balancent. Encore que si c'était leur croupion qu'elles balançaient...
Je vous ai causé de ceux qui font le plus de boucan ces derniers jours, mais je voudrais dire un ou deux trucs sur les autres parce qu'ils vont peut-être revenir à la charge. On le fait vite parce que je veux pas claquer trop de temps là-dessus. Comme je connais pas encore la fin, j'ai pas envie de les voir arriver comme un cheveu sur la soupe.
Après les gros flingues on a donc des petits-bras qui sont passés par là. Je dis ça comme ça, au passé, parce qu'y sont tous virés de chez Lilly au moment où je vous cause. Dans l'équipe à Lilly, Francis, le Pousse-Bouton, a fait un gros ménage ces derniers temps. En plus de Clara on verra :
Ils ont tous un gros défaut, c'est que c'est des gens que tu les connais tellement & y sont chez toi depuis tellement longtems que tu les vois plus ; tu vas lâcher des trucs qu'y fallait pas. Comme y sont comme tout le monde, ils ont les mirettes & les esgourdes qui fonctionnent avec en plus un bulbe pas en panne qui enregistre ce qui faut & surtout ce qui faut pas. Les souvenirs c'est comme les interdits, moins on doit le savoir meilleur c'est & plus ça reste. À mon avis c'est pour ça que Francis les a tous lourdés. Si ça commence à chauffer dans le coin avec des tirs qui viennent de partout, alors tu lâches ceux en qui t'as pas confiance.
Francis y se sert pas mal dans les stocks à Lilly & puis, avec les années qu'ont passées, il aimerait bien devenir le chef, prendre la place de la vieille.
Ricky fait partie de ces proches du pouvoir qui font bien leur boulot sans faire de bruit. Lui son bouleau c'est d'être le chef de la bande des engraisseurs de pognon pour Lilly. La Lilly, si elle a des gros morceaux de l'Auréole & Neslait elle a quand même besoin de gens qui s'occupent de ça & de ce qui en retombe. Quand tu palpes quelques centaines de patates tous les ans, t'as pas assez de temps pour tout claquer dans l'année. T'as pas non plus assez de temps pour tout compter, alors tu te payes une équipe.
Leur truc c'est de faire en sorte que Lilly conserve le plus son fric pour que ce soit elle qui décide de ce qu'on en fait ; pas Nico & sa bande. C'est pas qu'elle trouve Nico nul, c'est juste qu'elle veut pas que ce soit pas elle. Un exemple : not' gars Nico il a toute une équipe qui se charge de faire tourner l'univers de la croix verte, de la livreuse de gueulards au boucher. Et y en a du peuple dans ce monde là tu sais ; si t'as dix gamins qui bossent t'en auras :
En résumé t'as six gars qui ramènent contre deux qui sont payés pour dépenser. Et ce qui te reste à l'arrivée sert à raquer les vieux, les jeunes, les pas en forme & les glandeurs qu'y soient chez eux ou dans les bureaux du chef. Madame Lilly elle aime pas trop ça, faut dire qu'elle vient du privé & faut pas que les autres foutent leur nez dans ses affaires. C'est pour ça qu'elle a créé un gang avec son mec Dédé, elle leur a filé plus de cinq cents patates, & des nouvelles hein, pas des d'avant le Général. Les gonzes y sont chargés de trouver une bonne maladie qui traîne & ensuite de trouver les pilules qui réparent ; genre le coup de pied au cul qui soigne la flemme. C'est bien comme truc, mais ça plaît pas à tout le monde, ça fait des jaloux.
C'est pour tout ça que Ricky y s'occupe des boîtes de la vieille, celles qui sont les siennes à elle toute seule. Francine la gamine a aussi des billes, mais elle a le droit que de fermer sa gueule. Une des boîtes s'appelle Célymène, c'est le nom qu'avait choisi Dédé en souvenir de la nuit de noces qu'y s'était payé avec Lilly. Y a même le copain Martial qu'en a fait une goualante quelques années plus tard.
Francis on l'appelle Pousse-Bouton parce qu'y se dit photographe. Lui pour un artiste, c'est un artiste. Avec son matos dans la main y vous demande une pose & y vous prend par dessus, par dessous, par devant, par derrière, par tous les côtés. Vous récupérez une croûte qui vous fait dire qu'y faudrait pas faire autant la fête avant de poser. Bref, y fait de l'art avec ton groin. L'est pas nul Pousse-Bouton, juste un peu beaucoup très cher.
C'est un vieux pote de Lilly qu'elle connaît depuis qu'il était jeune, quand ça cognait fort dans les rues de Paname. Vous savez, quand les jeunes qu'étaient supposés se casser le train pour avoir des jolis diplômes à mettre sur les murs, y sont descendus de leurs piaules pour gueuler plein de choses & surtout se fritter avec les képis.
Ces gamins c'étaient des chiards de riches qu'avaient qu'une idée : écouter du bruit en fumant des tiges qui sentaient pas du tout la Gitane. Aller à l'école quand ce que t'as vraiment envie c'est tirer un coup, ça le fait pas. Alors ils se sont mis à hurler, c'est vrai qu'ça fait du bien de gueuler de temps en temps, ça soulage & une fois qu'on l'a fait on cherche plus à cogner. Mais eux y gueulaient contre les chefs ; en vrai y râlaient après leurs vieux, tous les vieux.
Y faisaient la révolution qu'y disaient. Pour que les riches gagnent plus un radis & que les pauvres non plus. Personne encaisse quoi que ce soit, on échange ce qu'on a avec ce qui manque. Bref, y voulaient revenir avant Jésus, le progrès de leur rêve c'était de faire comme autrefois. Le progrès à reculons. Le truc qu'y z'avaient pas compris c'est que une révolution ça veut dire faire un tour complet & ça a pas manqué, quand ils ont fini la révolution on était revenus sur la case départ. Le gros souci qu'on a avec eux c'est qu'en prenant de la bouteille ils ont aussi pris des galons & que maintenant c'est des gars comme ça qui décident pour nous de plein de trucs. Maintenant faut avouer qu'on vote pour eux. S'y sont cons, on vaut pas plus.
Bref, Pousse-Bouton c'était un vieux camarade à Lilly & son mac, y connait plein de gens qui passent tout le temps dans les feuilles de chou pour vendre leur dernier navet.